714ème Jour de Guerre en Europe

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1/ L’autre guerre, celle des symboles ; 2/ Russie, candidat en laisse ; 3/ Une déclaration sans confiance ; 4/ LR asphyxié ; 5/ Où va Renaissance ? ; 6/ Le moment nationaliste en Europe ; 7/En France, on abandonne les pauvres.

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1/ L’autre guerre, celle des symboles

La décision de la Cour de justice internationale n'est pas une victoire de l'Afrique du Sud, c'est une défaite symbolique pour Israël. Tout simplement parce que stipuler qu'il y ait un RISQUE génocidaire à Gaza, c'est briser le rapport particulier de la communauté internationale avec Israël après "Ce que l'homme a fait à l'homme", pour paraphraser Primo Levi et son "Si c'est un homme". Il y aura un avant et un après. Car personne ne met en cause la nature de cette juridiction même si elle n'a pas les moyens de faire appliquer ses jugements. Jamais l'État d'Israël n'a été à ce point isolé et menacé dans ce qui fait sa légitimité symbolique. Et ceci n'est pas sans conséquences pour les communautés juives dans le monde. On le voit déjà sur certains campus américains. Les États-Unis se prépareraient à reconnaître unilatéralement l'Etat palestinien et des sanctions pour les colons en Cisjordanie. C'est l'autre bilan de Netanyahou et de ses soutiens d'extrême-droite. Le Premier ministre israélien tente de délégitimer ce jugement avec la mise en cause de l'UNRWA, principal témoin à charge dans ce procès. Cette ONG est symbolique. C'est l'œil de Caïn de Hugo pour Israël. Elle a été fondée dès la naissance de l'État d'Israël pour prendre en charge les réfugiés palestiniens. Elle est là, partout rejetée et partenaire, redoutée et observée. Le Wall Street Journal cite un rapport des "services" qui incriminent 12 employés de cette ONG sur 12 000 et 1200 plutôt sympathisants de la cause palestinienne voire pour certains du Hamas sur les 30 000 qui s'occupent des 5 millions de Palestiniens dans les camps de réfugiés. L'infiltration par le Hamas de l'employeur ONG qui emploie des Palestiniens ne serait pas étonnante. Pas plus que la proximité avec le drame pour d'autres. La participation de 12 membres de L'ONG à la razzia barbare contre des populations civiles le 7 octobre en Israël n'est évidemment pas tolérable, elle est inacceptable. Mais la déposition de l'UNRWA devant le tribunal ne peut pour autant être mise en cause car elle relate des faits constatés par tous. La mise à l'arrêt de l'aide humanitaire via le refus de financer cette ONG décidé par des États interroge au regard de la situation des Gazaouis. Même si les États-Unis et l'Europe prennent soin de ne pas globaliser et laissent tout ouvert pour le financement en juin, tant la demande humanitaire est grande. Autre symbole, les États-Unis, la France et de très nombreux pays condamnent avec fermeté la réunion du palais de la Nation à Jérusalem de l'extrême-droite religieuse sur le thème "toute la terre d'Israël nous appartient" car la CIJ a énoncé pour Israël "l'obligation de prendre toutes les mesures en son pouvoir pour prévenir ce type de propos", c'est-à-dire la colonisation chassant les Palestiniens. 12 ministres, dont celui de la sécurité nationale Ben-Gvir, 15 députés et les 5000 présents ont scandé "transferts, transferts" en écho à "l'immigration volontaire des Palestiniens", "les portes du Sud de Gaza vont s'ouvrir et Israël va pouvoir se réinstaller", plaidant d'ailleurs pour un "post-sionisme" aux accents suprémacistes. Il s'agissait ainsi de donner un but symbolique à l'intervention à Gaza et donc existentiel pour les Palestiniens. L'ex-chef d'état-major israélien Gadi Eizenkot a été sévère stigmatisant "ceux qui n'ont tiré aucune leçon des événements de l'année dernière". Il est temps que là-bas un mouvement pour un "nouvel Israël" naisse avec une solution à deux Etats et que les Palestiniens trouvent ce chemin contrairement à un Khaled Mechaal (un des chefs du Hamas) qui vient de déclarer "nous rejetons une solution à deux Etats". Car derrière cette guerre des symboles, il y a la réalité des morts, de la désolation. Si on les rapporte à la population française, c'est 9 000 morts le 7 octobre en Israël et depuis 700 000 morts Palestiniens à Gaza.

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2/ Russie, candidat en laisse

Il semble que Nadejdine Boris ait obtenu son billet pour participer à la campagne présidentielle russe. Poutine a besoin d'un peu de controverse pour faire augmenter ainsi la participation. Mais ce ticket d'entrée est pour un périmètre défini. À savoir ne pas mettre en cause "l'opération spéciale" en Ukraine. Or, seule cette question peut aujourd'hui faire voter massivement pour un candidat qui s'oppose au dictateur. Car la situation économique est pour le moment gérable et Poutine en profite. La croissance est de 2,6% et le FMI prévoit un rebond à 3%. La Russie est devenue un Etat pétrolier à économie de guerre. Et cette dernière tire la croissance. Les dépenses militaires sont passées de 30 à 50%. Quant aux hydrocarbures, l'Inde a multiplié par 14 les importations et partage avec la Chine près de 90% des achats russes. Le rouble dévisse mais le yuan prend la place du dollar et de l'euro. Les exportations de céréales sont au plus haut niveau. Et le départ des entreprises occidentales a eu un effet d'aubaine pour de jeunes entrepreneurs russes avec 40% de création d'entreprises. Donc Poutine n'est pas confronté à court terme à une contestation économique et sociale. L'embargo n'a pas eu l'effet escompté. Il a touché paradoxalement les oligarques qui étaient les seuls à pouvoir contester le dictateur. Pour l'instant le candidat anti-Poutine fait de petites incursions sur ce domaine réservé au président sortant jusqu'à quand ? et évoque peu la situation intérieure. La guerre provoque la mise en cause de Poutine. On comprend les raisons du périmètre électoral.

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3/ Une déclaration sans confiance

Après le teasing du président Macron un quart d'heure avant la déclaration de politique générale du Premier ministre, une première sous la 5ème République, Macron ne changera jamais. On attendait son fils à l'Assemblée. Ce fut celui de Sarkozy. La tardive déclaration de politique générale du Premier ministre a été droite dans les bottes de Sarkozy. Désmicardiser la France, honorer les rendez-vous médicaux, le RSA avec obligation, la réforme de la loi SRU et bien sûr la fameuse France qui se lève tôt qui n'a aucun droit, ce fut un festival sarkozien. Ce qui faisait la « fun touch » de G. Attal à savoir : trancher, "je dis, je fais" a disparu sous une avalanche de jeux de mots heurtés, et un cap autorité - libéral par la preuve. Sur le plan économique c'était pour le moins nébuleux, pas de mesure choc à court terme. On ne sait pas qui va payer les 12 milliards de réductions des déficits et on maintient la transition écologique avec moins de normes d'impôts et de soutien budgétaire. Ce n'est plus le « en même temps », c'est tout et le contraire de tout. Quant à la volonté de cocher toutes les cases en vue de préparer les élections européennes, cela a fini par rendre le discours inopérant. Il est vrai qu'entre "Ma présidence sera écologique ou ne sera pas" du président Macron et son "Il n'y a rien au-dessus de l'agriculture" après avoir fait la même chose sur l'école, il était obligé de sortir de cette nasse par des mesures concrètes pour les agriculteurs pour intéresser le chaland. Ce discours sans confiance se heurte à la méfiance générale. Puis pour juguler la crise agricole, G. Attal s'y reprend à trois fois, joua au bonneteau dans les annonces, passe la patate chaude à l'Europe et la grande distribution, avec l'aide déterminante et décisive du Patron de La FNSEA.

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4/ LR asphyxié

En France, c'est fait, nous vivons depuis un sondage mettant sur le podium Marine Le Pen, Jordan Bardella, Marion Maréchal seulement entrecoupé de E. Philippe qui ne se veut pas de gauche. Nous vivons donc sous l'emprise idéologique du nationalisme d'exclusion. Il a son groupe de presse qui donne le la. Ses idéologiques bien peignés - pas tout à fait en fait - jusqu'à l'Académie française et ses groupes identitaires qui ratonnent sur les réseaux sociaux en attendant plus. Les nationalistes pèsent 40% dans les sondages et encore on ne met pas LR. La gauche ne fait-elle que 30% si elle était unie ? C'est l'autre bilan de la Nouvelle Union pour un essor social. Après l'effondrement de la gauche de gouvernement. Nous sommes face à une vague continentale. Que va donner la poussée nationaliste en Europe ? Celle-ci combinée à la présidence de Orban en juin, ce russophile anti-européen hongrois. Puis ce sera de la Pologne dont on ne sait si le PiS aura repris le pouvoir, en tout cas, il pèsera sur l'exercice. Nous entrons donc dans une séquence de plus d'un an favorable aux nationalistes en Europe et en France. Ceci au moment où, à commencer par l'Allemagne, la récession est là, à part la France aux prix d'un endettement colossal. Une Europe avec un débat sur l'immigration dévastateur, une question de sécurité européenne primordiale, 95 millions de pauvres, l'inflation et un débat explosif entre transition écologique et agriculture. Chut, en France, on croit surtout à gauche que le progressisme mène toujours le monde.              

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5/ Où va Renaissance ?

Pour l'instant, E. Macron tient les deux ailes de sa majorité par les nominations au Gouvernement à venir. Mais l'exercice ne va pas être simple même si le président veut réduire au maximum de passer par la case parlementaire. Le côté "vous avez aimé E. Philippe, vous allez adorer G. Attal" va finir par agacer le maire du Havre. Pour l'instant, l'ancien Premier ministre passe ses nerfs sur son sac de boxe. Son moment serait les municipales mais c'est loin. On peut donc pronostiquer sans se tromper quelques uppercuts, crochets cross et autres jabs décrochés d'ici là tout en déclarant "vouloir aider". B. Lemaire qui avait programmé de présenter ses vœux à la presse juste avant la déclaration de politique générale a décidé de jouer le grand Condé maître en son Royaume : l'économie, les finances, l'industrie, l'énergie, le commerce intérieur et extérieur, gardien de l'orthodoxie budgétaire en attendant sa fronde avec le "Mazarin de poche" Attal. Darmanin lui a déjà programmé son départ, espérant un sans-faute lors des Jeux olympiques, ce qui n'est pas gagné. Mais le ministre de l'Intérieur est déjà ailleurs, compréhensif vis-à-vis des agriculteurs comme des Calédoniens et pensif sur ses lendemains. Hors du jeu plutôt que hors-jeu, il espère être redoutable sur le banc de touche. Reste F. Bayrou qui assiste contrit à la fin du "en même temps". Et la sarkozysation culturelle du macronisme le contrarie fortement. Lui qui ne l'a jamais acceptée dans la droite. On le sait rumine. Mais aimant signer les événements. Là ! C'est un peu compliqué à faire. S'il n'est pas bien servi dans le Gouvernement, a commencé par lui, et dans la composition de la liste européenne. On peut aisément prévoir une ruée dans les brancards. L'exécutif joue tout sur l'opinion et la non-défaite électorale. Pour l'opinion, c'est mal parti, la confiance est à 33% pour G. Attal comme pour Castex selon la Sofres. Quant aux élections européennes, Macron a fait tapis. Autant dire qu'après juin, il se sera refait ou sera défait. Et ses alliés présenteront l'addition pendant que la presse s'interrogera sur la fin du quinquennat. Mais gagné ou perdu dans les deux cas, la dissolution est la solution face à la désagrégation programmée de l'alliance macroniste.

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6/ Le moment nationaliste en Europe

Nous avons assisté lors du discours de politique générale à l'implosion de LR. Entre un discours recentré de Marine Le Pen et le discours décentré de Attal, le parti de la droite classique ressemblait à une compression de César. Cela était fascinant à voir. Plus le Premier ministre cochait les cases sarkozistes, plus Ciotti, le chef de LR, semblait absent. Ce n'était rien à côté de l'OPA de Marine Le Pen exigeant le redressement national par la restauration de l'État. Déjouant ainsi le piège de Macron qui cherche à la pousser à droite pour s'y mettre. (Elle vient d'ailleurs de passer pour la première fois en tête des cotes d'avenir). Le résultat de cette double pression fut un discours sans contour de O. Marleix, le patron des parlementaires républicains, lâchant quasiment au final : « on ne vous aurait pas voté la confiance mais on attend les actes pour le faire ». Le parti gaulliste est devenu un vulgaire parti conservateur de droite. Un parti qui a perdu son utilité et son âme. Il se veut tout autant nationaliste que l'extrême-droite et aussi libéral-dérégulateur que les macronistes. Résultat, l'offre apparaît une deuxième main prélude à la casse... aux européennes ?

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7/En France, on abandonne les pauvres.

Le ministre O. Klein avait déclaré avant de quitter le Gouvernement à cause de la loi sur l'immigration : "On doit tous se mobiliser pour que le logement ne devienne pas la bombe sociale de demain." Et "la bombe du logement a explosé" vient de souligner la Fondation Abbé Pierre. Elle ajoute qu'il s'agit de "l'année noire des mal-logés". Il y a en France 330 000 personnes sans domicile fixe. Chaque jour, 8800 personnes sont refusées au 115, dont 2400 jeunes. Les files d'attente pour un logement sont de 2,6 millions sur 4 millions de mal-logés et 12 millions en situation fragile dans ce domaine. Et l'État et les collectivités locales ont réduit de 12 milliards leurs investissements. Dans la France d'aujourd'hui, on abandonne les pauvres.

A dimanche prochain !

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Au moment où la Nupes s'est décomposée, un nouvel axe de recomposition se constitue : le Programme Fondamental. 

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